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Interview biathlon, Éric Perrot, l’étoile montante
Altitude Biathlon : On a travaillé avec ton frère il y a quelque temps, il nous racontait une petite anecdote. Vous étiez partis pour une course à pied assez longue en Norvège, puis il a fait une hypoglycémie et tu as dû le porter jusqu’en bas… Peux-tu nous en dire un peu plus s’il te plait ?
Éric : Ouais carrément ! Cet été, on a fait une belle sortie en Norvège. Je pense qu’il n’a pas trop l’habitude et ça allait peut-être un peu vite à certains moments. Il y a un moment où je l’ai perdu de vue et je l’ai retrouvé complètement cuit, en train de marcher au milieu de la pampa. On a essayé d’aller jusqu’au bout mais ça n’a pas suffi donc il a fallu le porter un peu pour descendre. Sur le coup ce n’était pas très drôle parce que je me suis dit qu’il ne fallait pas le laisser traîner au sommet de la montagne sinon ça n’allait pas bien se passer. Après je l’ai porté un peu et on a réussi à descendre ensemble.
On peut dire que tu es un brave homme alors ?
Oh ça je ne sais pas, mais il ne fallait surtout pas le laisser là-haut !
Es-tu content de ta saison ?
Oui ! C’était une saison avec beaucoup de hauts et de bas. Il y a eu pleins de bonnes choses surtout à la fin de la saison, en termes de résultats. C’est vrai que le début de saison était plus mitigé, plus difficile. Mais là où je peux dire que c’était une bonne saison, c’est parce qu’il y a eu des moments difficiles mais aussi des bons rebondissements. Le fait d’avoir réussi à rebondir dans l’échec, ça fait que je suis vraiment satisfait de cette saison.
Comment as-tu construit ta saison ? Est-ce que tu y allais un peu au feeling, course après course ou avant le début de saison tu avais déjà des objectifs bien précis ?
J’avais des objectifs bien précis. Après le début de saison, c’est vrai que je n’étais pas là où je voulais être. J’avais vraiment envie d’aller « titiller » les plus grands sur les résultats et puis m’installer plus dans l’équipe, être plus souvent dans les relais même si finalement j’y étais beaucoup. Je n’étais pas tout à fait là où je voulais être et pourtant au fur et à mesure de la saison, j’ai réussi à revenir un peu au niveau que je souhaitais et enfin pouvoir performer.
J’imagine que ça t’a mis un coup au moral quand tu as su que tu redescendais en IBU Cup début janvier ?
Bien sûr ! Ça ne fait jamais plaisir. Après, c’était amplement mérité. Je n’arrivais pas à performer en Coupe du Monde donc il fallait qu’il y ait quelque chose. Puis je méritais de redescendre un niveau en dessous et Oscar avec qui j’ai échangé, méritait de monter. C’était tout à fait normal et ça m’a aussi permis de me retrouver, de me concentrer sur mon ski et mon tir, et de rebondir correctement pour la suite. Même si au début c’est déplaisant, ça m’a beaucoup servi pour la suite de la saison.
Tu fais de très beaux résultats à Ostersund notamment, tu vas chercher une sixième place sur l’individuel puis tu claques un podium (3ème sur la mass start), qu’est-ce que tu te racontes quand tu vas chercher ton premier podium en carrière, à quoi penses-tu sur la piste ?
Pendant la course je ne me raconte pas grand-chose. Je pense vraiment au moment présent et je suis concentré sur les choses que j’ai à faire. J’avoue qu’il n’y pas beaucoup de pensées qui traversent ma tête à ce moment-là parce que je suis vraiment à fond dans ce que je fais. Mais à l’arrivée quand je vois que je suis sur le podium, je prends quelques secondes pour en profiter parce que c’était un moment magique. C’est vrai qu’il y a un décalage entre le moment sur la piste où je ne pense pas à grand-chose et à l’arrivée où il y a un peu moins de pression et où je prends le temps de profiter. Je sais que j’ai fait une super course donc ça fait vraiment plaisir.
Tu finis justement derrière deux norvégiens et on sait que tu as des origines norvégiennes par ta maman…L’ambiance est-elle bonne avec eux malgré les fortes rivalités ?
Il y a des fortes rivalités mais c’est ce qui fait qu’il y a une bonne ambiance je trouve. J’adore me confronter à eux et c’est les meilleurs mondiaux actuellement donc c’est un honneur de pouvoir se battre avec eux et d’arriver sur mon premier podium avec deux norvégiens devant. C’est vrai que c’était assez amusant de pouvoir discuter avec eux à l’arrivée. C’est que du plaisir cette rivalité et ça donne envie d’être meilleur.
Ils ont pratiquement tout remporté cet hiver, est-ce que parfois tu ne préférerais pas faire partie de leur groupe et profiter de cette forte densité ?
Je pense qu’ils ont une vraie force de groupe, ils ont quelque chose de très fort et l’avantage d’être norvégien certes, mais moi je suis très fièr de mon groupe, très fièr d’être français et de représenter la France sur les courses. Je pense qu’on n’a rien à leur envier. Cette année ils ont été plus forts que nous mais on a toutes les ressources nécessaires pour aller les battre l’année prochaine et les années qui suivent. Honnêtement, je suis très content d’être français.
Dans l’équipe de France, il y a eu quelques conflits, où te positionnes-tu par rapport à tout ça ?
C’est toujours délicat d’avoir des conflits dans l’équipe, ce n’est pas facile. Ce qui est sûr, c’est que nous, athlètes, nous sommes tous très soudés et on cherche vraiment des solutions. Notre objectif est d’être proche de la fédération, nous n’avons pas envie de leur faire la guerre. On est là pour que ça se passe le mieux possible. Maintenant, à nous d’être dans la discussion avec tout le monde pour réussir à trouver les bonnes solutions. L’enjeu c’est que chacun comprenne les besoins des uns et des autres et qu’on arrive à s’entendre sur un point commun. Je pense que ça va très bien se passer, ça nécessite juste un petit peu de temps et de construction.
Tu as fait les championnats du monde militaires où tu fais vice-champion du monde du sprint, n’était-ce pas trop dur de se remettre dedans après la fin de saison ? De devoir encore aller chercher des résultats alors qu’on a peut-être envie d’être en vacances et de poser la carabine…
Si c’est sûr ! On a eu une semaine de récupération après Oslo, j’avoue que je n’ai vraiment pas beaucoup skié. J’ai tout débranché. D’un côté j’étais trop impatient d’aller à ces championnats du monde militaires, mais ce n’était pas facile d’y retourner après une semaine de repos. Cependant, ça s’est bien passé et quand j’ai vu que j’avais plutôt la forme, c’était motivant, et je savais que j’avais les capacités pour aller chercher des bons résultats. Avec une bonne forme et après avoir tout débranché, j’avais la motivation nécessaire pour y aller.
Puis c’est un contexte un peu différent donc ça donne quand même envie d’y participer.
Et donc maintenant quelle est la suite ? De quoi sera fait ton été ?
Vacances cette semaine pour commencer et ensuite un peu de repos à la maison. Puis je vais retourner à l’université travailler quelques cours parce que je n’ai pas le temps pendant la saison donc il faut que je prenne ces moments-là pour m’occuper de mes cours. Puis la nouvelle saison attaque déjà en mai pour se préparer pour l’hiver prochain. Ça va bien s’enchaîner !
Quels sont tes objectifs pour l’avenir ?
Mes objectifs sont toujours les mêmes, c’est de continuer à grimper les échelons, de me rapprocher des meilleurs mondiaux et avancer dans le futur. Donc il faut continuer à être patient, avancer étape par étape et continuer à me rapprocher des meilleurs et à faire ma place dans cette équipe de France.
Pour finir, j’ai une petite question d’un internaute : seras-tu peiné pour ton adversaire, quand dans trois ans, tu battras Johannes Boe sur le fil pour le gros globe lors de la Mass Start d’Oslo ?
Pas du tout ! Non, je n’aurai pas de peine pour Johannes Boe car je pense qu’il n’en a pas beaucoup pour nous actuellement et j’espère que j’aurai la chance d’avoir cette rivalité avec lui dans le futur, ça serait un honneur !
Merci beaucoup Éric, bonnes vacances et bonne continuation !
Avec plaisir !
Interview réalisée par Flavie Guichardon, Mai 2023
Crédit photo – NordicFocus