Interview biathlon Simon DESTHIEUX

Altitude Biathlon : Simon, tu as 27 ans, bientôt 28 ans en décembre prochain. Tu es n°4 mondial au classement de la Coupe du Monde l’hiver dernier. Quelles sont tes ambitions pour la saison qui s’annonce ?

Simon Desthieux : Mon objectif le plus important cet hiver, sera clairement les mondiaux d’Antholz-Anterselva du 13 au 23 Février 2020 . Évidemment, toutes les épreuves sont importantes, mais Antholz est un lieu que j’apprécie particulièrement. Il y fait souvent beau, le paysage est splendide, la piste est géniale à skier. Nous y sommes allés en stage cet été, c’était chouette, s’il y a une course à gagner cet hiver, j’opte pour Antholz.

En février 2018, tu deviens champion Olympique du relais mixte avec Anaïs Bescond, Marie Dorin-Habert et Martin Fourcade. Que représente ce titre à tes yeux ?

Cette journée reste un gros moment d’émotion et de partage dans l’équipe. J’ai le souvenir d’une journée impeccable, comme il en existe peu. On vit beaucoup d’émotions en biathlon, parfois des bonnes, parfois des moins bonnes. Le biathlon, c’est parfois frustrant. Je t’explique : lorsque tu fais une belle course et que tu gagnes…eh bien les copains, eux ils ne gagnent pas. Tu peux difficilement partager ta joie avec eux. L’émotion, tu la vis sur la ligne d’arrivée mais ensuite, tu te concentres très rapidement sur les courses à venir. Or lors du relais mixte aux Jeux Olympiques, c’est un collectif qui gagne. Ce jour-là, on a fait la course parfaite, chacun de notre côté mais c’est ensemble que l’on a gagné. Alors en effet, c’est un bon souvenir.


© département de l’Ain

Tu es régulièrement classé dans le top 10, lors d’épreuves en coupe du monde, que te faudrait-il pour être plus souvent sur la « boîte » ou pour gagner ? Est-ce que cela passe par progresser au tir ?

On me dit souvent que je dois progresser en tir mais je ne suis pas d’accord. Je tire bien, mais tu sais, ce n’est pas si simple. Le biathlon, c’est un enchainement de deux disciplines très différentes. A l’entrainement, je tire bien. En course, faire le sans faute, ce n’est pas évident. Mais je ne suis pas inquiet. J’arrive dans mes meilleures années et je pense que ça va payer. Le tir n’est pas mon problème majeur. En revanche, j’ai souvent le sentiment de rater mes débuts de saison. Et en milieu de saison, j’ai l’impression parfois de vouloir rattraper les courses loupées, de vouloir aller vite sur les skis…C’est long une saison et il est difficile d’être régulier. L’équilibre est compliqué à trouver.

L’hiver dernier, Quentin est 3ème du général de la coupe du monde, tu es 4ème. Antonin Guigonnat vice-champion du monde, Martin, malgré une saison en demi-teinte, reste très performant. L’équipe de France masculine est tout simplement « monstrueuse ». Quelle ambiance règne entre vous ?

Excellente vraiment ! On se connait tous parfaitement, et c’est d’ailleurs parce que l’ambiance est top que nous faisons ces bons résultats. Ce qui est bien, c’est qu’à tour de rôle, tout le monde y arrive. C’est chouette car ce n’est pas toujours le même qui gagne ou monte sur le podium…et je pense que cela contribue aussi à ce bon climat au sein de l’équipe.

 Il me semble que tu as un petit surnom en équipe de France, qui est « Carlito » ? Peux-tu nous dire d’où cela vient ?

Quand je suis entré en équipe de France, nous étions deux à avoir pour prénom « Simon », l’autre étant Simon Fourcade. Et pour nous différencier, on m’a appelé Carlito. Mais depuis que Simon Fourcade a quitté l’équipe de France, ce surnom disparait progressivement et tout le monde recommence à m’appeler Simon.



Tu partages ta vie avec Célia Aymonier, elle-même biathlète de haut niveau et membre de l’équipe de France féminine de biathlon. Comment faites-vous pour que le biathlon n’envahisse pas votre vie de couple ?

Bah c’est drôle parce qu’avec Célia, à la maison on parle très peu de biathlon en fait. Évidemment, on prend soin l’un de l’autre et on veille l’un sur l’autre. Mais nous avons beaucoup de centres d’intérêts communs et donc, nous parvenons à avoir d’autres passions qui nous occupent et nous distraient du biathlon.

On ne vous a pas vu aligner ensemble sur un relais single mixte ? Est-ce une volonté délibérée de votre part ou l’occasion ne s’est simplement pas encore présentée ?

Non, en effet, l’occasion ne s’est jamais présentée mais ce serait génial !! Le relais single mixte, c’est un format court et d’autres sont meilleurs que nous c’est tout. Néanmoins, j’adorerais (rires).

Lors de la saison de biathlon, avec quel co-équipier partages-tu ta chambre ? Y a-t-il des affinités que vous respectez ou un peu à l’image d’une bonne bande de potes, vous changez de compagnons de chambre fréquemment ?

Comme je te l’ai dit, l’ambiance est vraiment bonne et je m’entends vraiment bien avec tous les garçons de l’équipe. On essaye de tourner durant la saison et de changer les binômes de chambre.




En dehors du biathlon, quelles sont tes passions ? Parviens-tu d’ailleurs à avoir du temps pour en profiter ?

Oh oui. Le problème, c’est que j’ai plein de passions (rires). Je suis toujours à faire des choses. J’adore la nature et donc, je fais souvent une activité en lien avec la nature. J’ai un jardin potager dont je m’occupe souvent. Mais j’adore aussi cuisiner. J’apprécie vraiment le bricolage et notamment la menuiserie et le tournage sur bois. Je ne sais pas pourquoi, mais ça me détend, et puis ça m’amène à être créatif. J’aime vraiment ça.

Tu es originaire du Bugey, dans l’Ain, tout comme le trailer, un certain Xavier Thevenard qui lui aussi, vient du ski de fond je crois. Le connais-tu personnellement ?

Oui, Xavier était comme moi au comité de l’Ain. Il est un peu plus âgé que moi mais en effet, nous avons skié ensemble étant jeunes. Lors des stages avec le comité, nous nous entraînions parfois au Plan d’Hotonnes et nous mangions le midi chez ses parents qui tiennent une auberge là-bas.

Le biathlon devient de plus en plus populaire en France, notamment avec la diffusion des épreuves en clair et en direct sur l’équipe 21. Pensais-tu avoir un jour à vivre cette notoriété ? N’est- ce pas contraignant au quotidien ?


Je n’imaginais pas du tout que le biathlon serait autant apprécié et populaire. Mais tout cela s’est fait petit à petit, progressivement. C’est drôle parce qu’aujourd’hui, lorsque je skie, je suis reconnu…Les clubs se remplissent et c’est vraiment une bonne chose. Les jeunes viennent aujourd’hui s’inscrire et veulent faire du biathlon. Pour nous, le fait d’être reconnu n’est pas un point gênant, en tout cas pour moi. Au contraire, les gens restent bienveillants. Pour Martin, cette reconnaissance et ces sollicitations sont nettement plus fortes. Partout où il va, il est reconnu, à l’aéroport… partout. Mais il semble lui aussi bien gérer cette notoriété.

Tu es n°4 mondial, c’est une pression supplémentaire pour cet hiver, un nouveau rôle de favori au sein du « peloton » ?

Sur la ligne de départ, nous sommes une vingtaine à pouvoir gagner la course. Il y a un bon nombre de biathlètes qui ont un gros niveau et donc, je ne me considère pas comme un leader. Je pense d’ailleurs que Quentin et Antonin pensent comme moi. Après, étant donné qu’on se connait tous plutôt bien, chacun connait les qualités et les points faibles de l’autre. En ce qui me concerne, je sais que je suis rapide sur le dernier tour. C’est d’ailleurs comme ça qu’on m’appelle parfois, l’homme du dernier tour (rires). Mais comme je te le disais aussi tout à l’heure, les formats courts ne sont pas mon point fort. Sur les longs formats, on sait quels sont les coureurs qui skient vite, et quels sont ceux qui vont moins vite. Ce sont des bons indicateurs, notamment une fois le dernier passage effectué au pas de tir.

Tu es plutôt discret. Il est assez rare de lire des interviews de toi. Est-ce que ce retrait est volontaire de ta part ?

J’aime bien être tranquille mais je ne recherche pas à tout prix à être en retrait. Je suis de tempérament discret c’est vrai mais aucune volonté de ma part à m’effacer.


© département de l’Ain


A quoi ressemblent tes vacances ?

Il y a différents types de vacances. Souvent, début septembre, on part avec Célia et on se repose complètement. Mais de façon générale, nous sommes plutôt actifs voire même très actifs. Et si on reste à la maison, j’essaie de faire un maximum de choses en dehors des entrainements. Comme je te l’ai dit, j’adore m’occuper de mon jardin, bricoler. J’ai plein de passions, je ne m’ennuie jamais.

Simon, merci de cet interview. Je te souhaite une belle saison 2019/2020.

Interview menée par Guillaume TROLONG-BAILLY avec l’aide des questions issues des réseaux sociaux

Crédits photos – département de l’Ain



Simon DESTHIEUX et sa compagne, la biathlète Célia AYMONIER